Parent décédé,quels droits de visite sur l’enfant pour les grands-parents ?

Lorsque l’un des parents décède, laissant un ou des enfants mineurs, le problème des droits de visite des grands parents revêt un caractère particulier.

Le décès de l’un des parents va constituer un véritable tsunami familial.

Lorsque l’enfant où les enfants sont petits , le parent survivant va avoir besoin d’appuis familiaux pour l’aider à traverser cette période tant la vie familiale est bouleversée dans tous ses aspects .

A la douleur s’ajoutent des nécessités de réorganisation familiale qu’il faut traiter dans l’urgence. Le parent survivant ne peut abandonner son travail et doit s’organiser pour s’occuper seul des enfants et pourvoir à leurs besoins .

Le rôle des grands-parents est souvent essentiel dans cette période.

Du côté du parent survivant , la relation grand-parentale n’est pas sensiblement modifiée et ceux -ci pourront apporter une aide précieuse , le temps nécessaire à une rorganisation de la vie familiale.

Du côté des parents de la personne décédée, les choses se présentent de manière différente . Les grands-parents ont perdu leur enfant et sont eux aussi dans une grande douleur.

La place du ou des petits -enfants change considérablement. Le petit-enfant est le descendant du parent décédé. Il est aussi le lien qui continue à unir les grands-parents à leur enfant décédé.

Pour le petit enfant qui vient de perdre son père ou sa mère , les parents de ce denier lui permettent de maintenir le lien avec sa famille du côté du parent décédé et d’avoir accès à l’héritage culturel et familial de ce dernier.

Ce qui ne peut plus être transmis par le parent décédé peut l’être par ses propres parents .

Si le foyer grand-parental avait constitué pour l’enfant un repère stable et chaleureux , il y trouvera réconfort et une continuité rassurante.

Les grands-parents voudront souvent s’occuper le plus possible de leur petit-enfant et le plus souvent le parent survivant y trouvera également réconfort et soutien.

La situation reste néanmoins très délicate et donne lieu à un contentieux assez fréquent.

En effet les uns et les autres ne vont pas évoluer de la même façon.

Du côté du parent survivant , le deuil va se faire le temps passant , le parent va vouloir réorganiser sa vie avec ses enfants puis refaire sa vie.

Avec le temps il n’acceptera plus que les grands-parents prennent une place prépondérante. Il sera souvent reproché aux grands-parents d’effectuer un transfert d’affection entre le parent décédé et les petits enfants , d’entretenir au delà du raisonnable la mémoire du parent décédé rendant l’environnement délétère pour l’enfant , de ne pas accepter le nouveau conjoint…

Le parent survivant , lorsqu’il refait sa vie a envie de se projeter dans l’avenir et de créer un nouveau foyer avec les enfants et son nouveau partenaire.

Même si l’aide des grands-parents a été précieuse, arrive un moment où elle n’est plus nécéssaire , voire envahissante. La relations peuvent alors rapidement se dégrader.

Du côté des grands-parents , la situation est différente . La perte de leur enfant est un drame définitif et ils ne peuvent pas “refaire leur vie” .Le petit -enfant a pris une place particulière dans leur existence, surtout s’ils s’en sont beaucoup occupés.

Il leur est souvent intolérable de voir moins souvent leur petit-enfant et considèrent que leur rôle de transmission est essentiel et justifie une présence très soutenue de l’enfant à leurs côtés. Il peut être particulièrement difficile de voir apparaître une nouvelle compagne ou un nouveau compagnon qui pourrait se placer comme ” parent de subsitution”.

Les relations peuvent donc se dégrader même si elle sont été très bonnes dans les mois où les premires années qui ont suivi le décès.

Ces problématiques sont donc toujours délicates et s’inscrivent dans un contexte douloureux.

Lorsque le litige est soumis au tribunal , les grands-parents auront tendance à sollicite un droit de visite et d’hébergement très large alors que le parent survivant voudra au contraire que les grands-parents retrouvent auprès de l’enfant “une place normale”.

Or il n’y a rien de normal dans ces situations .

Il n’est pas normal de perdre son enfant lorsqu’il a une trentaine d’année, il n’est pas normal de perdre son conjoint dans la fleur de l’âge , il n’est pas normal de perdre son père ou sa mère lorsqu’on a 3, 5 ou 7 ans.

Il y a en revanche très souvent une légitimité dans les positions de chacun.

Il est légitime que les grands-parents veuillent conserver un lien étroit avec leur petit enfant et veuillent lui transmettre l’héritage familial dans ses différents aspects.

Il est légitime que le parent qui a perdu son conjoint veuille se projeter dans l’avenir et refaire da vie et donner à ses enfants un nouveau foyer .

Les juges sont bien conscients de la spécificité de ces situations et tiennent compte de la singularité des cas qui leur sont soumis pour fixer le rythme des droits de visite et d’hébergement des grand-parents qui sera souvent plus large que dans un cas classique . Toutefois, le juge aura aussi en tête que l’enfant doit s’intégrer pleinement dans son nouveau foyer et être tourné vers l’avenir.

La recherche d’un accord semble primordial dans ce genre de situation.

La procédure judiciaire va inmanquablement dégrader les relations et raviver le souvenir d’une période terrible.

Ces litiges doivent donc être appréhendés avec beaucoup de soin en prenant garde de ne pas conflictualiser inutilement la situation.

Dominique Ferrante

Avocat divorce, droit de la famille Paris

Droits de visite des grands-parents, un exemple de refus

Dans un arrêt du 16 novembre 2023 ( 21/12057), la Cour d’Appel de Paris a débouté la grand-mère de sa demande de droits de visite et d’hébergement alors que la grand- mère avait obtenu en première instance un droit de visite très large sur ses petits enfants, les week-ends pairs, y compris pendant la première moitié des vacances scolaires.

Dans cette affaire les parents et leurs enfants avaient vécu chez la grand-mère pendant deux ans, créant ainsi des liens forts entre la grand-mère et ses petits enfants.

Toutefois il est apparu que non seulement la grand-mère se plaignait régulièrement de son gendre, critiquait sa religion et ses pratiques religieuses . Il est également apparu que le mari de la grand-mère se montrait très agressif et que la grand-mère défiait l’autorité parentale des parents. Elle avait notamment emmené les enfants chez son futur mari alors que les parents avaient au préalable exprimé très clairement leur refus. De vives tensions avaient entraîné le déménagement des parents.

La grands-mère avait ensuite alterné courriers recommandés et plaintes .

La Cour d’appel a supprimé le droit de visite de la grand-mère considérant “que le refus de la grand-mère de prendre conscience de ce que son comportement a pu avoir de perturbant pour ses petits enfants, ne permet pas d’apaiser les relations. De même l’utilisation rapide de la lettre recommandée, des dépôts de plainte et de la demande d’un droit de visite et d’hébergement à l’égal de celui d’un parent, démontrent l’absence de prise de conscience de l’intérêt des enfants qui milite pour une pacification des relations intra-familiales. “

En conséquence il est apparu à la Cour que “l’intensité du conflit familial et la détérioration des relations entre les parties rendent légitimes la crainte des parents de voir leurs enfants confrontés à l’attitude critique de la grand-mère et de son mari vis à vis de leurs parents et qu’il soient donc placés dans un conflit de loyauté destructeur. “

La Cour a donc débouté la grand-mère de ses demandes et s’est bornée à donner injonction aux parties de rencontrer un médiateur.

Dominique Ferrante

Avocat Divorce et Droit de la Famille PARIS

Faut il écrire au juge en cours de procédure ?

Il arrive parfois après une audience qu’une des parties ait envie d’écrire au juge , estimant que tout n’a pas été dit ou qu’elle souhaite répondre à l’argumentation adverse.

Il faut garder à l’esprit qu’après l’audience les débats sont clos et le juge ne pourra pas prendre en considération un courrier ou une nouvelle pièce. Dans des cas exceptionnels le juge peut expressément autoriser une note en délibéré ou qu’une pièce soit remise en cours de délibéré.

Les notes en délibéré si elles ont été autorisées seront produites par les avocats dans les délais impartis par le juge .

Avant l’audience , il n’est pas conseillé non plus aux parties d’écrire au juge .

Les parties assistées par un avocat n’ont en aucun cas à s’adresser directement au magistrat . Elle peuvent en revanche demander leur avocat de prendre des conclusions pour préciser ou compléter l’argumentation.

Si la partie n’a pas d’avocat , il n’est toujours pas d’usage d’adresser des courriers au juge .
La demande est faite dans l’acte introductif d’instance et la magistrat aura connaissance de vos pièces et de votre argumentation de jour de l’audience.

Il est assez logique que les parties ne correspondent pas avec le magistrat par courrier sauf à saturer complètement le système judiciaire.

Dominique Ferrante

Avocat en divorce et en droit de la famille PARIS

Article 371-4 Code Civil , Relations entre l’enfant et un tiers ayant résidé avec lui

Aux termes de l’article 371-4 alinéa 2 du Code civil ,
Si tel est l’intérêt de l’enfant, le juge aux affaires familiales fixe les modalités des relations entre l’enfant et un tiers, parent ou non, en particulier lorsque ce tiers a résidé de manière stable avec lui et l’un de ses parents, a pourvu à son éducation, à son entretien ou à son installation, et a noué avec lui des liens affectifs durables.

Dans une espèce récemment soumise à La Cour de Cassation , deux femmes s’étaient mariées en 2017 et l’une d’elle avait donné naissance à un enfant quelques mois plus tard. les épouses se séparent en 2018 , et l’épouse qui n’était pas la mère de l’enfant saisit le juge aux affaires familiales pour bénéficier d’un droit de visite et d’hébergement à l’égard de l’enfant .

La mère de l’enfant s’y opposait , invoquant la brièveté de la relation et la violence du conflit lié à la séparation.

La Cour d’appel accorde un droit de visite et d’hébergement à l’égard de l’enfant , relevant que l’enfant était né d’un projet parental commun et que des liens affectifs s’étaient tissés et que l’épouse de la mère avait dès la naissance pris la place de deuxième parent, ce qui avait amené la mère à accorder à son épouse un droit de visite et d’hébergement avant que les relations ne se dégradent postérieurement à la séparation.

La Cour en déduit qu’il est de l’intérêt de l’enfant que la place du tiers demandeur soit préservée, la seule mésentente entre les deux femmes ne pouvant suffire à l’éluder.

La Cour de Cassation approuve la Cour d’Appel , considérant qu’elle a statué en considération de l’intérêt supérieur de l’enfant.

( Cass Civ 1 9 février 2022 N° 20 19 128).

Dominique Ferrante

Avocat en Divorce et Droit de la Famille à Paris