Contraindre le conjoint quitter le domicile familial

D’une manière générale , on ne peut contraindre le conjoint à quitter le domicile familial en l’absence de décision judiciaire , même si le logement appartient en propre au conjoint qui souhaite le départ de l’autre ou si le bail est à son nom.

Le logement familial est en effet protégé.
Article 215-3 code civil : Les époux ne peuvent l’un sans l’autre disposer des droits par lesquels est assuré le logement de la famille, ni des meubles meublants dont il est garni. Celui des deux qui n’a pas donné son consentement à l’acte peut en demander l’annulation : l’action en nullité lui est ouverte dans l’année à partir du jour où il a eu connaissance de l’acte, sans pouvoir jamais être intentée plus d’un an après que le régime matrimonial s’est dissous.

Si le bien appartient aux deux époux, il n’est pas possible de contraindre le conjoint à quitter le domicile tant que le juge n’a pas statué.

De même si le logement appartient en propre à l’époux qui souhaite voir partir son conjoint . Il ne peut l’y contraindre sans décision judiciaire et ne peut pas vendre le bien sans l’accord de son conjoint.

En cas de logement locatif , le bail est réputé être aux deux noms suite au mariage , même s’il avait été initialement conclu par un seul des deux époux.

Par ailleurs l’article 1751 code civil stipule que :

“Le droit au bail du local, sans caractère professionnel ou commercial, qui sert effectivement à l’habitation de deux époux, quel que soit leur régime matrimonial et nonobstant toute convention contraire et même si le bail a été conclu avant le mariage, ou de deux partenaires liés par un pacte civil de solidarité, dès lors que les partenaires en font la demande conjointement, est réputé appartenir à l’un et à l’autre des époux ou partenaires liés par un pacte civil de solidarité.”

En cas de divorce ou de séparation de corps, ce droit pourra être attribué, en considération des intérêts sociaux et familiaux en cause, par la juridiction saisie de la demande en divorce ou en séparation de corps, à l’un des époux, sous réserve des droits à récompense ou à indemnité au profit de l’autre époux.

Ainsi il n’est pas possible de contraindre le conjoint à quitter le domicile familial tant qu’une décision judiciaire n’a pas été rendue .

En cas de divorce , le juge va lors de l’audience d’orientation et sur les mesures provisoires attribuer la jouissance du domicile à l’un des conjoints ( article 255 code civil )

Il sera alors possible d’expulser le conjoint s’il refuse de se plier à l’ordonnance rendue .

La procédure de divorce peut être initiée en urgence en formant une demande à bref délai , notamment en cas de violences.

L’époux victime de violence peut également introduire un référé violence (article 220-1 du Code civil) pour que le juge ordonne m’éloignement du conjoint violent.

En cas de couples non mariés ,

Lorsqu’il est saisi d’une requête relative aux modalités d’exercice de l’autorité parentale, le juge aux affaires familiales peut attribuer provisoirement la jouissance du logement de la famille à l’un des deux parents, le cas échéant en constatant l’accord des parties sur le montant d’une indemnité d’occupation.

Le juge fixe la durée de cette jouissance pour une durée maximale de six mois.

Lorsque le bien appartient aux parents en indivision, la mesure peut être prorogée, à la demande de l’un ou l’autre des parents, si durant ce délai le tribunal a été saisi des opérations de liquidation partage par la partie la plus diligente ( article 373-2-9-1 code civil) .

Par ailleurs, en cas de violences, une ordonnance de protection peut ordonner l’expulsion du conjoint violent en cas de violences conjugales , qu’il s’agisse de couples mariés ou non .

En effet article 515-11 code civil dispose que : “le juge peut
4° Se prononcer sur le logement commun de partenaires liés par un pacte civil de solidarité ou de concubins. La jouissance du logement commun est attribuée, sauf ordonnance spécialement motivée justifiée par des circonstances particulières, au partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou au concubin qui n’est pas l’auteur des violences, et ce même s’il a bénéficié d’un hébergement d’urgence ( купити постільну білизну ). Dans ce cas, la prise en charge des frais afférents peut être à la charge du partenaire ou concubin violent ; “

Enfin pour les couples mariés comme pour les couples non mariés , en cas de procédure pénale , le procureur peut prendre une mesure d’éloignement.

L’article 41-1-6 CPP prévoit en effet :
“En cas d’infraction commise soit contre son conjoint, son concubin ou son partenaire lié par un pacte civil de solidarité, soit contre ses enfants ou ceux de son conjoint, concubin ou partenaire, demander à l’auteur des faits de résider hors du domicile ou de la résidence du couple et, le cas échéant, de s’abstenir de paraître dans ce domicile ou cette résidence ou aux abords immédiats de celui-ci, ainsi que, si nécessaire, de faire l’objet d’une prise en charge sanitaire, sociale ou psychologique ; les dispositions du présent 6° sont également applicables lorsque l’infraction est commise par l’ancien conjoint ou concubin de la victime, ou par la personne ayant été liée à elle par un pacte civil de solidarité, le domicile concerné étant alors celui de la victime. Pour l’application du présent 6°, le procureur de la République recueille ou fait recueillir, dans les meilleurs délais et par tous moyens l’avis de la victime sur l’opportunité de demander à l’auteur des faits de résider hors du logement du couple. Sauf circonstances particulières, cette mesure est prise lorsque sont en cause des faits de violences susceptibles d’être renouvelés et que la victime la sollicite. Le procureur de la République peut préciser les modalités de prise en charge des frais afférents à ce logement pendant une durée qu’il fixe et qui ne peut excéder six mois ; “

Dominique Ferrante

Avocat à Paris