Prestation compensatoire et exécution provisoire

La prestation compensatoire est due lorsque le divorce est définitif.

En effet , durant la procédure , les époux reste tenus au devoir de secours.

L’époux dans le besoin va pouvoir percevoir une pension alimentaire au titre du devoir de secours. Le juge peut également lui attribuer la jouissance du domicile familial à titre gratuit au titre du devoir de secours. A l’issue du divorce , le devoir de secours prend fin.

Lorsque le divorce entraîne des disparités dan les conditions de vie respectives des époux, le juge va accorder une prestation compensatoire qui sera appréciée en fonction de la situation des époux .

En effet, aux termes de l’article 270 du Code civil, le divorce met fin au devoir de secours. L’un des époux peut être tenu de verser à l’autre une prestation destinée à compenser, autant qu’il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans leurs conditions de vie respectives. Selon l’article 271 du Code civil, la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l’époux à qui elle est versée et les ressources de l’autre, en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l’évolution de celle-ci dans un avenir prévisible.

En cas d’appel , la prestation compensatoire ne sera pas payée à l’issue de la procédure en première instance et la procédure d’appel dure environ deux ans.

Selon l’article 1079 du CPC la prestation compensatoire ne peut d’une manière générale être assortie de l’exécution provisoire.

Toutefois, elle peut l’être en tout ou partie, lorsque l’absence d’exécution aurait des conséquences manifestement excessives pour le créancier en cas de recours sur la prestation compensatoire alors que le prononcé du divorce a acquis force de chose jugée.

L’exécution provisoire de la prestation compensatoire en première instance est donc facultative .

L’article 515 du CPC précise que lorsqu’il est prévu par la loi que l’exécution provisoire est facultative, elle peut être ordonnée, d’office ou à la demande d’une partie, chaque fois que le juge l’estime nécessaire et compatible avec la nature de l’affaire.

Elle peut être ordonnée pour tout ou partie de la décision.

Il est donc possible de demander en première instance l’exécution provisoire de tout ou partie de la prestation compensatoire , mais les cas sont limités . Il faut que l’absence d ‘exécution ait pour l’époux créancier des conséquences financières manifestement excessives et que l’appel ne porte que sur les conséquences du divorce.

Il y a donc intérêt pour le créancier à solliciter en première instance l ‘exécution provisoire de la prestation compensatoire, car le juge ne l’ordonnera pas d’office sauf cas rarissimes.

Dominique Ferrante

Avocat Divorce, Droit de la famille Paris


Prestation compensatoire et devoir de secours

Dans un arrêt du 12 octobre 2022 ( 20-20-235) , la première chambre civile de la Cour de cassation a rappelé que la pension versée au titre du devoir de secours ne doit pas être prise en considération pour apprécier la prestation compensatoire.

Aux termes de l’article 270 du Code civil, le divorce met fin au devoir de secours. L’un des époux peut être tenu de verser à l’autre une prestation destinée à compenser, autant qu’il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans leurs conditions de vie respectives. Selon l’article 271 du Code civil, la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l’époux à qui elle est versée et les ressources de l’autre, en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l’évolution de celle-ci dans un avenir prévisible.

En l’espèce la Cour d’appel avait retenu que le bénéficiaire avait perçu pendant la durée de l’instance une pension au titre du devoir de secours et avait fixé la prestation compensatoire en tenant compte de cette somme.

La Cour de Cassation considère que la pension fondée sur le devoir de secours, allouée pour la durée de l’instance en divorce, ayant un caractère provisoire, elle ne peut être prise en considération pour fixer le montant de la prestation compensatoire , la Cour de cassation censure en conséquence la Cour d’appel .

La solution est identique lorsque le conjoint susceptible de bénéficier d’une prestation compensatoire a bénéficié de la jouissance gratuite du domicile familial pendant la durée de la procédure .

Cette jouissance gratuite est en effet consentie au titre du devoir de secours.

Dans une affaire récente, la Cour d’Appel avait débouté l’épouse de sa demande de prestation compensatoire en retenant que celle ci avait bénéficié de la jouissance gratuite du domicile familial pendant 7 ans.

La Cour d’appel est censurée par la Cour de cassation dans un arrêt publié au bulletin du 13 avril 2022 ( 1ère chambre 20-22-807), considérant que la Cour d’ appel n’avait pas à prendre en considération l’avantage constitué par la jouissance gratuite du domicile conjugal accordé à l’épouse au titre du devoir de secours pour apprécier l’existence d’une disparité dans les conditions de vie respectives des époux justifiant l’octroi d’une prestation compensatoire.

Dominique Ferrante

Avocat Divorce et droit de la Famille à Paris

Exemples chiffrés de prestation compensatoire

Voici quelques exemples chiffrés de prestation compensatoire dans des affaires récentes:

CA Versailles 20/01/2022 RG 20/03882 :

13 ans de mariage dont 7 ans de vie commune

Madame 45 ans auto entrepreneuse , ses revenus sont passés de 3000 € à 520 € en quelques années sans explications convaincantes .

Monsieur 48 ans décorateur , ses revenus sont de 7700 € par mois.

Le patrimoine indivis s’élève à un million d’euros.

La prestation compensatoire accordée à Madame est de 60 000 € .

Cour d’Appel de Metz 10/05/2022 RG 20/01490 :

24 ans de mariage dont 19 de vie commune .

Madame a 51 ans et est enseignante . ses revenus sont de 2860 €, sa retraite s’élèvera à 1300 € .

Monsieur a 65 ans et est retraité. Sa retraite s’élève à 4260 € .

La prestation compensatoire accordée à Madame s’élève à 75 000 € .

Cour d’Appel de Paris 17/12/2021 RG 10/15467 :

20 ans de mariage dont 12 ns de vie commune, un enfant.

Madame a 54 ans et a des revenus insignifiants .

Monsieur a 50 ans et travaille en qualité de cadre à l’international . il est expatrié.

Ses revenus s’élèvent 117 000 € + 15 000 € de prime d’expatriation outre logement et véhicule de fonction.

Les droits de Madame sur le patrimoine commun sont de 400 000 € , ceux de Monsieur de 460 000 € .

La prestation compensatoire accorde à Madame est de 95 000 € .

Dominique Ferrante

Avocat à Paris

Prestation compensatoire et devoir de secours

Civ 1 13/04/22 Rg 20/22807

Dans une affaire récemment soumise à la Cour de Cassation , l’épouse reprochait à la Cour d’appel de l’avoir déboutée de sa demande de prestation compensatoire , le juge d’appel ayant pris en considération, pour apprécier le droit de l’ épouse à une prestation compensatoire, l’avantage constitué par la jouissance gratuite du domicile conjugal accordé, au titre du devoir de secours, à l’épouse qui demandait une prestation compensatoire.

En l’occurrence l’épouse avait bénéficié pendant plusieurs années de la jouissance gratuite du domicile familial.

La Cour de Cassation rappelle que la jouissance gratuite du domicile familial accordée pendant la durée de la procédure ne peut être prise en compte pour apprécier la situation des parties au regard de la prestation compensatoire.

Il s’agit là d’une jurisprudence bien établie. Les sommes versées au titre du devoir de secours n’ont pas à être prises en compte pour apprécier le montant de la prestation compensatoire : Cassation civile  30 janvier 2019  N° 18-13715  qui rappelle «  qu’en prenant en considération l’avantage accordé à l’épouse au titre du devoir de secours pour apprécier l’existence d’une disparité  créée par la rupture du mariage  dans les conditions de vie respectives des époux,  la Cour d’appel a violé les articles  270 et 271 du Code civil »

Dominique Ferrante

Avocat à Paris

Prestation compensatoire record

Dans un arrêt du 10 juin 2021 ( Pôle 3 chambre 4 RG 18/08589) , la Cour d’Appel de Paris a attribué à une épouse une prestation compensatoire de 400 000 € dont 150 000 € en capital.

Dans cette affaire, les époux avaient été mariés 32 ans , dont 22 ans de vie commune et avaient un enfant de 31 ans.

Même si l’épouse avait suivi son mari à l’expatriation pendant une quinzaine d’années, les époux étaient revenus en France alors que l’épouse n’avait que 45 ans et était en mesure de travailler et disposait d’un patrimoine de 370 000 € .

La prestation compensatoire accordée paraît donc élevée même en tenant compte de la très faible retraite de l’épouse , alors que celle du mari devrait s’élever à 5700 €.

La Cour a vraisemblablement tenu compte du fait que le mari avait eu deux enfants de sa maîtresse , nés pendant le mariage. Le divorce a d’ailleurs été prononcé aux torts exclusifs du mari.

Dominique Ferrante

Avocat à la Cour

Prestation compensatoire, le débiteur doit évoquer ses charges

Dans une affaire soumise à la Cour de cassation le 17 octobre 2019 ( 1ère chambre civile N° 18-22554) , le mari avait été condamné en appel au versement d’une prestation compensatoire. Il se pourvoie en cassation reprochant à l’arrêt de n’avoir pas déduit de ses ressources la contribution à l’entretien et à l’éducation des trois enfants communs que la Cour avait mise à sa charge ni la contribution qu’il versait pour sa fille aînée née d’un premier lit.

La Cour de Cassation reconnaît en effet qu’en statuant ainsi la Cour d’appel avait violé les articles 27 et 271 du Code civil.

La Cour de Cassation rejette néanmoins le pourvoi considérant qu’après avoir mis en évidence la différence de niveau des revenus perçus par chacun des époux , ” la Cour d’appel a pu retenir l’existence d’une disparité créée par le divorce dans les situations respectives des époux, justifiant l’octroi d’une prestation compensatoire à l’épouse, sans prendre en considération la pension alimentaire mise à la charge du père pour l’entretien et l’éducation des trois enfants communs, et pour sa fille aînée, née d’un premier lit, qu’il n’avait pas invoqué au titre de ses charges”.

Dominique FERRANTE

Avocat à PARIS

Divorce Prestation compensatoire , circonstances antérieures au divorce

Aux termes de l’article 270 du Code civil : ”
Sauf lorsqu’il est prononcé en raison de la rupture de la vie commune, le divorce met fin au devoir de secours prévu par l’article 212 du code civil ; mais l’un des époux peut être tenu de verser à l’autre une prestation destinée à compenser, autant qu’il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives. “

Pour rejeter une demande de prestation compensatoire formée par l’épouse, la Cour d’Appel de Douai avait retenu que dans la mesure où l’épouse était dans la même situation qu’actuellement avant d’épouser son mari, elle ne pouvait prétendre que la rupture du mariage a créé une disparité dans les conditions de vie respectives des époux.

En l’espèce la femme ne travaillait pas avant le mariage et avait déjà en charge trois enfants. L’argument était donc de dire que dans la mesure où elle se trouvait dans la même situation au moment du divorce qu’avant le mariage, elle ne pouvait prétendre que le divorce entraînait des disparités dans les conditions de vie respectives.

La Cour de cassation a cassé cette décision en indiquant que la Cour d’appel en statuant ainsi s’était fondée sur des circonstances antérieures au prononcé du divorce pour apprécier le droit à l’épouse de bénéficier d’une prestation compensatoire.

Or la prestation compensatoire est fixée en tenant compte de la situation au moment du divorce et l’évolution de celle-ci dans un avenir prévisible et non en fonction de la situation au moment du mariage (Cass civ 1ère 6 novembre 2019 N° 18_23734)

Dominique Ferrante

Avocat à Paris